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Bottes et souliers de cuir sur mesure

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“Et c’est ainsi que, quand certaines “légendes” disent par exemple qu’il y eut un temps où les pierres précieuses étaient aussi communes que les cailloux les plus grossiers, cela ne doit peut-être pas être pris seulement en un sens tout symbolique.” - R.G. 

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Nous confectionnons sur mesure des bottes et des souliers de cuir. Contactez-nous pour discuter de ce que vous recherchez.

Nous pouvons aussi réparer sacs, accessoires et chaussures de cuir.

1.

Nos confections sont toutes de cuir, de l’empeigne à la semelle et nous préférons travailler avec le cuir de tannage végétal, tant pour ses qualités esthétiques que plastiques. C’était le tannage ordinaire des cuirs à chaussure européens et américains d’avant, disons, les Deux Guerres. Il est parmi les plus anciens, avec celui à la fumée et peut-être aussi celui aux sels, remplacé largement aujourd’hui par le tannage au chrome, plus rapide.

Tous nos montages sont cousus et ne doivent pas leur maintien à la colle. Nous avons quant à nous travaillé principalement le cousu trépointe pour la fixation de la semelle, mais n’excluons aucun autre type de couture, si demandé. Les chaussures que nous cousons se veulent élégantes, durables et réparables, autant que faire se peut.

Et si marcher au jour le jour avec des semelles de cuir peut paraître une expérience caduque pour la plupart de nous aujourd’hui, semblant même à certains quasi une fantaisie (“seulement pour un bal ou un mariage…”), nous répondons, fort de notre expérience, que c’est toujours une très belle et très confortable façon de marcher à chaque jour - soleil ou pluie-, même si, certes, la transition pourra paraître brutale à celui qui aurait toujours connu, par exemple, le marcher pneumatique du caoutchouc (nous posons néanmoins un petit coin de caoutchouc remplaçable au talon, à l’extrémité extérieure du bon bout, point de l’usure la plus rapide, où autrefois l’on mettait un fer).

Pour nous, le “marcher-cuir”, c’est aussi s’aligner aux innombrables prédécesseurs qui foulèrent d’un pas assuré le sol du monde - cités et campagnes; chemins pavés et routes de terre - avec sous les pieds une bonne et épaisse pièce de peau tannée et battue; cousue, chevillée ou clouée. D’aussi loin que nous porte notre regard ; d’Athènes, nous voyons les Philosophes, les Dramaturges, etc. ; de Paris, J-J Rousseau herborisant en-deçà et au-delà des barrières du Mur des Fermiers généraux, Victor Hugo - et donc par lui Jean Valjean, Cosette et Marius - Ernest Renan et sa soeur Henriette partant fouler ensemble la Terre Sainte, Claude Bernard au Collège de France, Romain Rolland traversant la Foire, Jean-Christophe et Olivier en tête, etc. ; d’Iasnaïa Poliana, le grand Léon Tolstoy et ses bottes, cousues par ses propres soins ; mais aussi, nous voyons de ces “Canadiens” : les souliers ferrés, et aussi ceux des “fées” de Félix Leclerc; les bottes à Menaud, maître-draveur, tel que vu par Félix-Antoine Savard; bottes sauvages, bottes malouines et souliers de boeuf que devait fabriquer et réparer le vieil Alexis “Picoté” Maltais, aux derniers chapitres d’une vie titanesque de pionnier du pays de Saguenay, telle que racontée bellement par Damase Potvin; les bottes du frère Marie Victorin herborisant, etc., etc., etc., - et cela, jusqu’à il n’y a pas si longtemps : des Cocteau, des Belmondo, des Dylan, Jagger, des Indiana Jones, etc., de toutes ces figures de l’imagier moderne, à travers films, magasines illustrés et affiches géantes, entr’apercevoit-on parfois du dessous du joli soulier ou de la si charmante bottine, la semelle de cuir polie par la marche.

Ce “marcher-cuir”, c’est enfin s’aligner aussi à tous les autres dont le nom ne s’est pas inscrit dans l’histoire universelle : paysans, cantonniers, médecins, professeurs, musiciens, amants, industriels, voyageurs, etc.

Même monde - Autre monde… Quel monde ? Le VÊTEMENT, les OUTILS - l’HABITATION, en général, sont, semble-t-il, une représentation de l’homme lui-même et c’est par où s’expriment, sans paroles, tant sa singularité que le caractère commun de chaque existence particulière, que ce soit dans la rareté, le degré d’invention ou d’innovation ou, au contraire, dans l’abondance, la répétition ou le caractère conventionnel des moyens qu’il emploie. “QUOI” est l’homme, ainsi? Y aurait-il des matières, par exemple, près desquelles et avec lesquelles il ferait bon vivre plus qu’avec d’autres?

Pressentant que bien des choses, peut-être même les plus essentielles, sont connues, depuis fort longtemps, nous recherchons dans la redécouverte des techniques traditionnelles cette abondance d’intelligence et de savoir-faire qui fut déjà, croyons-nous, l’apanage des ouvriers d’autrefois et, avec eux, des habitants du monde, différent, qu’ils bâtissaient de leurs mains. Patience et longueur de temps…

Ritournelle : Même monde - autre monde : quel monde ?

2.

Les cuirs de tannage végétal ne sont plus recherchés en cordonnerie que par quelques chausseurs. Ils sont cependant toujours les favoris des selliers, de certains maroquiniers et demeurent les seuls à pouvoir fournir de bons cuirs à semelles.

Cette industrie, au moins depuis les années quatre-vingt (tandis qu’elle était déjà mélangée à celle du cuir au chrome), est disparue du Québec et, espérons-nous (peut-être est-ce le projet de quelques jeunes d’ici en ce moment?), pourrait-elle un jour y retrouver sa place: façon d’employer les écorces du bois d’abattage; façon bien humaine d’étendre ses soins, si l’on veut, à chaque part de la dépouille d’un animal qu’on abat pour la boucherie (on tannait les cuirs du Montréal-aux-tanneries-nombreuses avec les écorces de Pruche du Canada).

Peut-être que cuirs, caoutchoucs et plastiques pourront un jour chacun trouver et remplir leur office sans rendre l’autre impensable…

3.

Un court documentaire de l’Office national du film (ONF), “Une tannerie artisanale”, réalisé par Léo Plamondon, en 1981, présente un peu de ce qu’a pu être cette industrie au Québec. M.Goulet, tanneur, nous y fait visiter la tannerie familiale de quatrième génération, à Ste-Luce, dans le Bas-St-Laurent, fondée en 185o. Au moment de ce film, on voit que cette tannerie avait intégré le chrome à sa production.

Outre Atlantique, nous avons été l’élève de M. Alexander Siebenaller, jeune tanneur Autrichien (Mönchmeierhof, Burgenland) à la recherche de savoir-faire ancestraux. Ses cuirs et ses pelleteries, préparés aux écorces qu’il rassemble dans son pays : chêne, saule, épinette, noyer, se perfectionnent de plus en plus.

https://www.onf.ca/film/tannerie_artisanale_une/

https://www.bioleder.at

4.

M. Francesco Ricciardi, natif de Gildone, province de Campobasso, en Italie, cordonnier de métier à qui, tout comme à M. Agostino Grignano, fils d’Antonio Grignano, natif de Cattolica, en Sicile, nous devons les rudiments de notre savoir-faire, faisait une fois pour nous le calcul et estimait que du temps qu’il était un apprenti pour l’un des cordonniers de son village, au début des années cinquante, une paire de bonnes bottines fortes de campagne, qu’on confectionnait de A à Z à la boutique, se vendait pour l’équivalent d’un mois du salaire d’un ouvrier. Investissement considérable donc, la chaussure de cuir, fabriquée au village. Un peu partout se chaussait-on aussi dans la campagne de sabots ou de galoches, ce faisant, car on a toujours dû pouvoir en fabriquer à moindres frais.

Nous n’avons pas encore retrouvé cependant de quoi refaire ce calcul nous-même, histoire de passer tout de même par la contre-épreuve de ces bons souvenirs, avec de ce que l’on peut sans doute, sans mauvaise foi, en attendre d’imaginations (Ce cordonnier vétéran ne nous racontait-il pas aussi que l’on trouvait davantage de vermine et de rats à l’intérieur même des humbles masures de Gildone que dans les champs et les bois des alentours?) .

M. Ricciardi nous racontait aussi le travail des cordonniers d’alors, attablés par quatre autour de leur établi bas, modulant des chansons pour rythmer leur ouvrage. Ce ne devait pas chaque jour être une idylle, bien que cette situation nous ait semblé, à nous déjà, enviable - non seulement pour nous-même, mais aussi, pensions-nous, pour les hommes en général…

Dans l’atelier l’hiver, on se réchauffait EN TRAVAILLANT, mais aussi, nous racontait-il, d’un seau rempli de braises tirées de l’âtre de la cuisine, posé sous l’établi. Les apprentis étaient employés à redresser les clous, à préparer des aiguillées pour les coutures d’empeignes, de trépointes et de semelles - toutes coutures ; on les mettait peu à peu à des ouvrages de plus en plus délicats et ils avaient autour de douze ou treize ans; parfois étaient-ils plus jeunes encore.

On fabriquait ces bottines fort solides, avec ce qu’on avait de cuir sous la main. On ressemelait les chaussures plusieurs fois au cours de leurs ans de service et la plupart du temps, on garnissait de grosses caboches rondes les semelles des bottes pour en ralentir l’usure.

Ce ne devait pas être une idylle chaque jour : sans, d’une certaine manière, beaucoup “d’éducation”, sans assurance emploi - sans protection aucune, rien que le contrat d’apprentissage fondé de longue date dans les moeurs de ces sociétés et la bonne foi du maître d’atelier, chez qui comme en tout homme des défaillances finissent par avoir l’empire - et tout ouvrage au fond finit sans doute par astreindre.

Comment pourtant retrouver la clé de ces métiers disparus, mais surtout de ce que ceux-ci, comme POSTURES, peuvent peut-être apporter de meilleur au destin des hommes?

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